Préparation de la scène de l’Arrosoir pour les captations fin 2020 des « Solos de Noël »

Crédit photo : Sidonie Dubosc

Lucas Le Texier

Le numérique prend une place de plus en plus importante dans les pratiques culturelles des français. Comment accompagner l’évolution de cette tendance chez les publics du jazz ? Perspectives avec les responsables d’établissements culturels en Bourgogne Franche-Comté.

On ne peut plus comprendre aujourd’hui la consommation de la culture sans s’intéresser aux pratiques culturelles numériques. Les quelques chiffres donnés par l’étude des Cinquante ans de pratiques culturelles en France de Loup Wolff et Philippe Lombardo font état d’une transformation profonde en ce qui concerne la musique : plus d’1/3 des français de 15 ans ou plus écoutent de la musique en ligne, et les contenus numérisés de la radio, télévision ou de la musique enregistrée prennent une place toujours plus importante dans le quotidien des habitants de l’Hexagone[1]. La quasi-totalité des programmateurs[2] interviewés évoquent la place grandissante des outils et contenus numériques dans le quotidien.

Au moment de mon entretien, Nicolas Petitot (Frontenay Jazz, Frontenay) m’expliquait que le site internet allait justement avoir une nouvelle version plus détaillée, couplée à une utilisation de Facebook et à la création d’un Instagram du festival. Idem pour Antoine Bartau (Le Crescent, Mâcon) dont le site du Crescent, qui permettait d’ores et déjà de réserver en ligne et de se renseigner sur la programmation, a été refait pendant le premier confinement. Une newsletter hebdomadaire est envoyée pour annoncer les concerts de la semaine, en plus du Facebook qui est utilisé comme moyen de communication.

Signe de l’importance de ces outils, Victor Landard (Le Bœuf sur le Toit, Lons-le-Saunier), lors de la reprise par son association du Bœuf sur le Toit, a recréé un site internet et s’est doté d’un chargé de communication : l’utilisation des réseaux sociaux comme Facebook ou Instagram permet de « raccrocher les publics ». Au travers de ces outils numériques qui sont maintenant répandus dans les structures, certains en profitent pour proposer un retour d’expérience. David Demange (Le Moloco, Audincourt) promeut la communication a posteriori de la date du concert, grâce à la diffusion de photos où les spectateurs peuvent se retrouver assistant à l’évènement musical.

Le contenu mis à disposition des publics rentre dans le cadre de la politique numérique. A La fraternelle, Christophe Joneau (La Fraternelle, Saint-Claude) renvoie sur son site, pour chaque spectacle, vers une vidéo, un teaser ou un Soundcloud où le spectateur peut simplement se faire une idée du concert. Guillaume Dijoux (Cabaret L’Escale, Migennes) a développé en plus des réseaux sociaux, une chaîne YouTube où le public peut retrouver la présentation de la saison artistique ainsi que les artistes qui vont s’y produire. Le numérique est le lieu de création d’un contenu spécifique, fait de courtes interviews et d’extraits musicaux : « On ne met pas un concert de deux heures en ligne. On essaye de travailler sur des petits formats d’une ou deux chansons » comme me le confirme Guillaume Dijoux. Même chose pour Médéric Roquesalane (L’Arrosoir, Chalon-sur-Saône) avec la diffusion des « Solos de Noël » sur le modèle d’un « calendrier de l’après » à la fin décembre 2020, ce qui a permis de remplacer les concerts qui n’ont pas été possibles en raison de la crise sanitaire. Des petites pastilles vidéo qui furent à retrouver pour les fêtes, non pas sous le sapin mais en ligne (voir les quelques vidéos de L’Arrosoir en 2020 et 2021 ci-dessous)

Il ne faudrait cependant pas y voir un remplacement mais plutôt une coexistence des moyens pour continuer de toucher les publics. D’abord parce que le contenu numérique induit de nouvelles modalités de consommation sans pour autant remplacer les anciennes. Ensuite, parce que les programmateurs font coexister les anciens outils de communications avec les nouveaux. Le Crescent garde la diffusion du support papier et les affiches trimestrielles pour annoncer sa programmation. La programmation papier de L’Arrosoir est toujours attendue et avec le bouche-à-oreille, les outils de communication traditionnels restent efficaces pour faire venir les publics. Comme le résume Victor Landard, « la communication, c’est finalement un panel d’outils ».

Le jazz s’exporte numériquement et s’adapte aux nouvelles consommations des publics. On cerne qu’il y a moins une substitution qu’une complémentarité qui s’installe. La pandémie a accéléré ces transformations, puisque le numérique permet aussi de mettre à disposition des publics un contenu qui lui est pour le moment inaccessible en présentiel.


[1] Philippe Lombardo, Loup Wolff, Cinquante ans de pratiques culturelles en France, Culture Etudes, 2-2, 2020, p. 1 et p. 28-30.

[2] Pour plus de simplicité, nous définirons génériquement toutes les fonctions de nos interviewés par « les programmateurs ».

Première partie de notre dossier sur les publics du jazz en Bourgogne-Franche-Comté ci-dessous :

Pour son édition 2020, le festival Frontenay Jazz a proposé plusieurs vidéos autour de l’événement
Concert capté de « Pax – hommage à Andrew Hill » enregistré live au Crescent (71) le 27 mars 2021.
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