Crédit photo : L’Arrosoir / Clément Vallery
Pascal Anquetil
Après un fou et flou semestre de navigation dans le brouillard pour cause d’épidémie covidienne, l’Arrosoir peut enfin cet automne ouvrir au public les portes de l’indispensable “scène de jazz et de musiques de traverse” de Chalon-sur-Saône et célébrer l’anniversaire d’un demi-siècle d’existence et d’aventure aussi passionnée que mouvementée.
Ce n’est pas tous les ans qu’une scène de jazz peut fêter son cinquantenaire. A l’exception du légendaire et septuagénaire Caveau de la Huchette à Paris et ces deux sexagénaires que sont le Hot Club de Lyon et le Jazz Club de Grenoble, le jazz club de Chalon-sur-Saône est aujourd’hui le seul à pouvoir célébrer aujourd’hui son jubilé. Créé en janvier 1971, il a d’abord été un fief du jazz traditionnel. C’est au début des années 90 qu’il est devenu un lieu ouvert à tous les jazz d’aujourd’hui. En 50 ans, le jazz club a connu plusieurs vies mouvementées, affronté des tempêtes périlleuses et traversé nombre de périodes d’angoisse et d’incertitude sur l’avenir du lieu. En 1999, l’équipe du jazz club de Chalon a choisi de se baptiser d’un nouveau nom : l’Arrosoir. Un changement dont les raisons furent expliquées en ces termes par Michel Gillot qui fut pendant plus de 15 ans avec flamme son président : “Dans l’expression jazz-club, nous n’étions pas gênés par le mot jazz, mais club… Le mot appelle tout de suite des adjectifs peu sympathiques : restreint, fermé, privé… L’Arrosoir, lui, est un ustensile commun, bon enfant, ouvert des deux bouts, il fait pousser les gens en les arrosant de musique, il fait pousser la musique en l’arrosant d’une attentive et chaleureuse présence humaine ; bref l’Arrosoir, ça nous allait mieux ! ». La revue Jazzman en janvier 1997 et janvier 1999, avait avec le concours de nombreux musiciens dans son « Guide des clubs de jazz en France» élu l’Arrosoir comme l’un de meilleurs de l’Hexagone. Pour en savoir plus sur l’histoire agitée du lieu, il faut lire le chapitre qui lui est consacré dans l’ouvrage “Bourgogne, terre de jazz ». Le texte est signé de la plume de Michel Gillot qui y développe la philosophie qui anime encore et toujours l’équipe de l’Arrosoir : « A Chalon, nous préférons inviter des musiciens que programmer des musiques. »
Ce n’est pas non plus tous les jours que l’anniversaire d’un tel jubilé est perturbé et retardé par une crise sanitaire aussi soudaine qu’imprévisible. Pourtant, pendant cette période de mise entre parenthèses forcée des concerts « live » dans la cave voûtée de l’impasse de l’Ancienne Prison de Chalon, Médéric Roquesalane, directeur et programmateur, gardien des lieux avec ses fidèles membres du bureau et ses généreux bénévoles, n’a pas chômé. Pendant six mois il a organisé toute une intense et continue activité souterraine, sans le soutien malheureusement du moindre public. A savoir : enregistrement de disques, tournage de clips, captation vidéo, résidence d’artistes et de groupes en vue de créer et tester de nouveau répertoires, coproduction du concert du Laurent Dehors Trio avec Jazz en herbe à Tournus, etc. l’Arrosoir a aussi su profiter de cette période de confinement pour renouveler son matériel, changer son affiche et son logo, mais aussi l’adresse de ses bureaux, situés désormais à deux pas de sa salle de concert au 30 rue Saint-Georges. Ces nouveaux locaux permettront, une fois quelques travaux effectués, de réaliser également des enregistrements.
Début octobre, enfin, aura lieu l’ouverture officielle des festivités jubilaires lors d’un week-end jubilatoire et riche d’un menu chargé : avec le vendredi 1er la Litanie des cimes, excellent trio créé en 2019 par le violoniste Clément Janinet avec Elodie Pasquier aux clarinettes et Bruno Ducret au violoncelle ; puis le samedi 2 l’Impérial Orphéon avec Rémy Poulakis (accordéon, et chant, Gérald Chevillon (saxophones basse et soprano), Damien Sabatier (saxophone baryton) et Antonin Leymerie (batterie) ; et enfin dimanche 3 la pianiste Anne Quillier en solo. L’affiche du trimestre s’annonce dans la foulée très alléchante avec le Velvet Revolution du saxophoniste Daniel Erdmann, puis Denis Badault, Christophe Girard, Pierre de Bethmann et, pour finir en beauté cette année compliquée, le Grand Bal du Réveillon.
Cinquante ans d’Arrosoir, pas de doute, ça s’arrose !
Programmation : www.arrosoir.org
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